lundi 2 mars 2009

De la vaisselle de luxe gallo-romaine sous terre, dans la cave d'une habitation antique de Reims


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Deux grands plats ronds en bronze recouvert d'argent martelé, ornés d'un motif perlé ; deux petits plats ovales à marli (bord) horizontal gravé d'un décor végétal; une coupe à collerette ; une coupelle ; quatre cuillères en argent et en bronze aux motifs de coquillages finement ciselés... C'est le trésor, daté du IIe ou IIIe siècles après J.-C., que viennent de mettre au jour, sous le tracé du futur tramway de Reims, les chercheurs de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap).



Cette vaisselle de luxe, qui ne pouvait appartenir qu'à un aristocrate aisé, était enfouie à près de 3 mètres sous terre, dans la cave d'une habitation antique détruite par un incendie. Ce qui explique que, protégée de la corrosion, elle soit remarquablement conservée. Sans doute s'agissait-il d'un service d'apparat plutôt que d'usage quotidien - les plats ordinaires étaient en terre cuite -, soigneusement rangé. Chaque pièce d'argenterie était entourée d'un linge, dont de larges morceaux, de plusieurs dizaines de cm2, ont été retrouvés presque intacts.

C'est ce qui rend cette découverte "tout à fait exceptionnelle", exulte Stéphane Sindonino, responsable scientifique des fouilles. Les textiles, très rapidement dégradés, ne subsistent habituellement que sous forme de trames oxydées sur des objets métalliques. C'est l'une des premières fois, en France, que des restes de tissus gallo-romains sont exhumés dans leur état et leur souplesse initiaux. Les chercheurs espèrent pouvoir, grâce à ces précieuses reliques, mieux connaître l'artisanat du tissage de la fin du Haut-Empire romain : nature des fibres (probablement du lin dans le cas présent), traitements, taille des métiers...

Ce n'est pas la seule trouvaille faite par les archéologues de l'Inrap dans le coeur historique de Reims. Sous la ligne de tramway toujours, ils ont révélé l'amphithéâtre gallo-romain, dont l'emplacement restait inconnu, ainsi que les fondations d'un arc monumental supportant un égout voûté de près de 3 mètres de hauteur.

Plus loin, dans la zone du vieux port, au bord de l'ancien lit de la Vesle, ils ont commencé à dégager, sur près de 4 000 m2, un ensemble de vestiges témoignant d'une intense activité artisanale : entrepôts, ateliers de tissage, fosses de stockage ou de décantation d'argile à poterie, fours de séchage de céréales ou de forge d'objets métalliques...

La particularité de ce quartier, décrit Philippe Rollet, responsable du chantier, est d'avoir été construit dans un milieu humide, avec des fondations reposant sur des pieux de chêne fichés dans la vase et un remblai de craie. Cette immersion a permis la conservation de matériaux organiques (bois, cuir, os, graines...) qui, à l'air libre, se seraient désagrégés. De l'ancien lit de la rivière ont déjà été retirés des chaussures gallo-romaines, une cuillère en os, une palette à fards, un peigne, des fragments de boîtes en bois tourné, ainsi que divers éléments de mobilier.

La dendrochronologie (étude des cernes des arbres) va maintenant permettre de dater avec précision le site. L'analyse d'une première série de 220 pieux a révélé qu'ils avaient été coupés au premier semestre de l'an 307, sous le règne de l'empereur Constantin, et qu'ils sont contemporains des thermes retrouvés sous l'actuelle cathédrale.

Pierre après pierre, se précise ainsi le visage de la Reims antique. Une cité - Durocortorum - qui, souligne Agnès Balmelle, de la direction interrégionale de l'Inrap, "s'étendait sur plus de 600 hectares et était la plus importante des territoires du nord de l'Empire romain".

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