mercredi 15 octobre 2008

Le corbeau ont des capacités de mémorisation étonnantes


Il est bien connu que l'éléphant n'oublie ni un compliment ni, surtout, un affront. Qu'il sait mémoriser ses pistes de déplacement et les endroits où il peut au mieux se nourrir en fonction des conditions climatiques. Qu'il conservera toute sa vie les liens d'autorité et d'affection qu'il aura établis avec les humains dans son jeune âge. Mais l'expression «avoir une mémoire d'éléphant», qui veut dire avoir une très bonne mémoire, est tout à fait injuste pour de nombreuses autres espèces animales.

Car beaucoup ont des capacités de mémorisation étonnantes qui dépassent, et de loin, ce que l'on a coutume d'appeler le simple instinct ou l'action des réflexes. Comment sinon un écureuil pourrait-il retrouver toutes les provisions qu'il a cachées dans un grand nombre d'endroits plusieurs mois après l'avoir fait ?

La mémoire reste en grande partie mystérieuse. Ce que l'on en sait vient d'ailleurs en grande partie d'expériences réalisées sur, ou avec, des animaux. Et pour mieux apprécier les capacités animales, il faut tout d'abord définir ce qu'est la mémoire. Ou plutôt ce que sont les mémoires. On en distingue cinq grands types chez l'homme. Celles qui concernent le long terme sont au nombre de trois : la mémoire perceptive (images, sons…), la mémoire sémantique (connaissances générales) et la mémoire épisodique (événements liés à des contextes précis). Elles se nourrissent évidemment les unes les autres et interagissent entre elles. Pour le court terme, il y a une mémoire de travail. Et nous possédons normalement une mémoire spéciale pour tout ce qui est apprentissage, apprendre à faire du vélo ou apprendre un poème par exemple.

On a longtemps cru qu'il y avait un QG de la mémoire, une zone où étaient stockés les souvenirs. Ce qui n'est pas le cas. Et on a même cru que la mémoire pouvait avoir pour support des molécules bien précises. Ce qui voulait dire qu'en faisant une décoction d'une partie de cerveau, et en l'injectant dans un autre, on pouvait transmettre les souvenirs d'un individu à un autre. De telles expériences troublantes ont bien été menées chez des invertébrés très rudimentaires mais la théorie de la molécule a fait long feu.

L'Albert Einstein des volatiles

Grâce à l'imagerie médicale moderne, on voit quelles sont les parties du cerveau qui s'activent lorsque l'on sollicite telle ou telle mémoire. On sait que l'hippocampe, une petite structure au centre du cerveau, joue un rôle important dans tous les processus de mémorisation, mais tous les cortex, le préfrontal, le temporal ou le pariétal, sont sollicités.

Et la mémoire est indissociable des capacités d'apprentissage et d'innovation. C'est d'ailleurs la première façon de tester la capacité de mémorisation d'un animal. Et si on sait que les primates ou les cétacés y parviennent très bien, on sait moins que des insectes en sont également capables. Des expériences ont ainsi été menées sur des abeilles, avec leur cerveau d'un millimètre cube. On envoie une certaine odeur sur leurs antennes et on leur présente une solution sucrée. Elles étirent alors la trompe qui leur sert à butiner pour profiter de la solution sucrée. Puis, au bout d'un certain temps, on ne fait que leur envoyer l'odeur sans la solution sucrée. Elles continuent pourtant d'étirer leur trompe. Elles ont mémorisé l'association odeur-récompense sucrée. L'expérience marche aussi avec les fourmis.

Autres animaux surprenants, les oiseaux. Bien que leur cerveau soit pratiquement dépourvu de cortex cérébral, ils sont pourtant capables de réaliser des prouesses de mémorisation. Pas tous les oiseaux, bien sûr. Une étude canadienne portant sur plus de 800 espèces de volatiles de par le monde a pu établir un classement selon l'«intelligence» de l'animal. C'est-à-dire ses facultés d'apprentissage et d'utilisation d'un outil.

C'est le groupe des corvidés, les corbeaux, geais et autres corneilles, qui est arrivé largement en tête (en queue de peloton, on trouve les faisans, les cailles ou l'autruche). Le grand corbeau (Corvus corax) avec son cerveau qui, toutes proportions gardées, est sept fois plus gros que celui du pigeon, semble bien être l'Albert Einstein des volatiles. On en a vu qui ont appris à compter jusqu'à 7 ou 8. On en a vu qui utilisaient des outils : ils prennent des feuilles rigides pour en faire des baguettes avec lesquelles ils attrapent des insectes.

Plus fort encore, une équipe de chercheurs allemands a très récemment montré que des pies avaient passé le test du miroir. En quoi cela consiste-t-il ? Le but de l'expérience est de savoir si l'animal à conscience de lui-même. Pour cela, on le place face à un miroir. Il voit soit un autre animal, soit son propre reflet. Mais comme il ne peut pas parler, il faut trouver une astuce. Alors à un moment, on le met face au miroir en ayant peint une grosse tache de couleur sur son corps. S'il se tourne vers son propre corps pour observer ou enlever la tache, c'est qu'il a conscience de lui. C'est ce qui s'est produit avec ces pies.
Source:le figaro



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